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Description de « Née après » : Lorsque « survivre » devient un crime...

Juive en Allemagne
 
 

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La guerre, oui, horrible. Indeciblement horrible

 
 
 
 
 
 

Mais qu'est-il arrivé aux quelques juifs qui, après avoir survécu, étaient obligés de rester en Alemagne ?

 
 
 
 
 
 

Et comment leurs enfants ont-ils pu vivre avec ce fardeau double − celui de la mémoire de leurs parents et celui de leur propre présent ?

 
 
 
 
 
       La guerre est finie. Au début, les peuples souffrent de la faim, du froid et de la destruction. Mais tout cela aussi est terminé depuis longtemps. Ce qui reste, c'est le néant. L'envie d'oublier. Ni vainqueurs, ni vaincus. Juste la douleur. Et le vide.
 
       Malgré tout, personne n'arrive à oublier. Sauf que les vainqueurs, souvenirs à part, ont trouvé consolation dans un compagnon surgi du néant : la haine. Les vaincus, en revanche, sont seuls avec leur tentation de rayer une partie de l'histoire de leur vie. Toutefois, cela ne change rien.
      Ce qui change, en revanche, et uniquement chez les vaincus, c'est la vérité. Ce qui était vrai, hier et avant-hier, est soudain devenu faux. Et la nouvelle vérité ne correspond pas forcément à celle d'autrefois, à celle d'une autre vie, lorsque le monde était encore intact.
 
       Mais en Allemagne, le jour où le peuple a perdu la Deuxième Guerre mondiale, ce n'est pas seulement la vérité qui a changé. Les vainqueurs ont également exigé le changement des opinions, de la philosophie, des sentiments, de tout ce qui se passe dans la tête, dans l'esprit - et dans le cœur. L'ennemi d'hier s'est transformé en ami, qu'il le veuille ou non. Le mal d'hier s'est transformé en bien.
 
       Un de ces changements imposés par les vainqueurs concernait les juifs. La veille, un juif était sale, fourbe, malhonnête. Sa présence était nocive pour les enfants - s'il ne les mangeait pas : beaucoup de cerveaux bien allemands croyaient à ce qu'on leur avait enfoncé dans le cœur.
      Comment faire lorsqu'on est un commerçant qui, pendant la majeure partie de sa carrière, a refusé de servir les juifs ? Comment faire lorsqu'on est un contrôleur qui, pendant la majeure partie de sa carrière, a scruté les passagers pour qu'aucun juif ne s'introduise dans son train ? Comment faire lorsqu'on est un voisin qui, pendant la majeure partie de sa vie, a surveillé le voisinage pour que personne ne cache un juif ?
 
       Comment faire lorsqu'on est enseignant depuis trente ans, et que la majeure partie de sa carrière s'est déroulée dans l'atmosphère nazie ? On n'est pas coupable, oh non - on n'a rien fait de mal. Juste son devoir.
 
       Vingt ans plus tard, on accomplit toujours son devoir. On ne doit plus haïr le juif ? Alors on l'aime. On ne doit plus l'exclure ? Alors on l'inclut, si nécessaire de force, contre son gré.
 
       Tout pour ne pas avoir l'air d'un nazi, aujourd'hui, vingt ans plus tard.
 
       Et les juifs ? Ceux qui ont survécu et ceux qui sont nés « après » ?
 
       D'abord, ils parlent d'argent. De la Wiedergutmachung, de l'indemnisation que l'ancien ennemi est condamné à leur payer. Et ils font tout pour en profiter au maximum, peu importent les moyens - et la légalité de ces moyens. Qui pourrait ne pas les comprendre ? Après tout ce qu'ils ont souffert ?
 
       Plus tard, il y a les jeunes. Ils sont nés « après », et ils veulent vivre au présent. Le passé ne les intéresse pas. Ce qu'ils recherchent, c'est la normalité. Ne plus avoir peur, ne plus être traité comme un« juif ». Ni comme un sale juif, comme pendant les années de guerre. Ni comme un bon juif. Comme maintenant.
 
       Jana fait partie de ceux et celles qui sont nés « après ». À la maternelle, elle apprend qu'elle n'est pas comme les autres. Parce qu'elle est juive. Pas une sale juive, mais une bonne juive. Celle qu'on doit aimer, sinon on risque d'être qualifié de nazi.
 
       À l'école, elle ne fait pas « partie ». Elle en a vite assez d'être aimée parce qu'elle est juive. Elle veut être aimée pour ce qu'elle est, elle, Jana, avec tous ses défauts - ces défauts que tout le monde feint d'ignorer, car dans l'Allemagne d'après, une juive ne peut pas être fautive. Celui qui cherche des fautes dans les actes d'une juive est forcément... nazi.
 
       Mais il lui reste la communauté juive et son centre de vacances à Sobernheim, où elle peut être juive parmi les juifs. Où elle n'est pas différente. Où elle « fait partie ».
 
       Pour « faire partie », toutefois, il faut plus que partager la même religion. Jana ne correspond pas au profil des amies de Pommine, la cheffe, la meneuse, celle qui a le père le plus influent. Laquelle, faute d'être la plus belle, est la plus riche, la plus sûre d'elle, la fille qui a tous les droits. La plus puissante. Jana ne lui témoigne pas le respect qu'elle attend. Pire - elle ose avoir ses propres opinions. Pour Pommine, Jana est l'adversaire prête à détruire ce qui lui est le plus cher : son pouvoir.
 
       Mais elle sait se venger. Ce n'est pas pour rien qu'elle a les meilleures relations...
 
       D'une certaine manière, Pommine rend service à Jana. Grâce à celle qui devient rapidement son ennemie, elle comprend vite que ce monde-là n'est pas le sien non plus.
 
       Elle comprend qu'elle n'a pas de monde à elle.
      Tandis que d'autres filles de son âge rêvent d'être belles, Jana rêve de ne pas être juive. Ou, plutôt, de « faire partie » d'un cercle d'amis, malgré sa religion juive.
 
       Ainsi, Jana vit dans plusieurs mondes. Il y a celui de ses camarades à l'école, où elle est la bienvenue, mais l'étrangère. Celui de ses parents, marqué d'un père éternellement malade des suites de son internement en camp de concentration et d'une mère vivant constamment dans cette peur que les années d'après-guerre n'ont pas réussi à lui faire oublier. Celui de ses ancêtres. Celui de la communauté juive, où beaucoup de filles aimeraient bien être ses copines, s'il n'y avait pas Pommine. Celui de la religion dont son père est toujours si fier.
 
       Et le monde qu'elle s'est bâti elle-même, celui de la liberté partagée avec les autres. Celui dans lequel elle « fait partie »...
 
       Déchirée entre l'univers juif dont elle sait qu'il est le sien, mais qu'elle ne comprend toujours pas, et son désir désespéré d'être acceptée par les « autres », d'être aimée pour elle-même, Jana porte aussi le fardeau des souvenirs de son père.
 
       Car la pire souffrance de Josef habite son esprit : la mémoire. La mémoire de ceux qu'il a aimés. La mémoire des horreurs qu'il a vues. Et encore et toujours la même question : pour quelle raison est-il en vie, alors que les autres ont été assassinés ?
 
       Jusqu'au jour où il n'est plus le seul à poser cette question. Car quelque vingt-cinq ans après la guerre, les Allemands ont le sentiment d'avoir assez donné aux juifs. Ils se sont mis à rechercher les maillons faibles, les brebis galeuses, pour fermer le robinet financier. Ils ouvrent la chasse à ceux qui avaient commis le crime d'avoir survécu.
 
       Jana vit le procès fait à son père - un procès au cours duquel on parle beaucoup d'argent. Mais l'argent n'est qu'un synonyme de culpabilité.
       Pour la première fois de sa vie, Jana n'est plus seulement confrontée à un environnement dont elle a toujours rêvé de faire partie, mais aussi à la question du bien et du mal. Josef est-il coupable pour avoir survécu ? Comment un homme réagit-il face à la faim ? Qui est innocent et, surtout, qui ose jeter la première pierre ?
 
       Le passé rattrape Jana comme, petit à petit, il rattrape tous les juifs nés en Allemagne d'après-guerre.
 
       Mais le monde de Jana ne se limite pas aux juifs, aux non-juifs qui prétendent être les « normaux » et à ceux qui accusent son père. Il inclut aussi un autre tribunal, celui qui l'accuse d'avoir tué son ennemie, Pommine. Là, il n'est plus question de son père, mais d'elle-même. C'est elle qui est coupable. Peut-être.